Comment faire pour parler à un enfant de la perte et du deuil, lorsque nous sommes confrontés à la disparition brutale d'un être proche et cher ? (notre conjoint, le père de nos enfants...) ? Nous n'y voyons plus clair : de puissantes réactions psycho corporelles secouent le corps et l'esprit. Dont un déferlement d'émotions et de sensations : " le sol s'est dérobé sous mes pieds", "j'ai eu l'impression d'un écroulement...", "ma tête explosait..."...
Et si nous sommes responsables d'êtres dépendants de nous, des enfants, comment faire pour leur en parler sans les enfermer dans nos émotions ? en trouvant les mots pour le dire et en les invitant à l'accueil de leur propre ressenti ?
Un espace pour exprimer vos émotions d'adulte
Ainsi, nous avons besoin d'aide à ce moment là. Trouver un espace pour exprimer nos propres émotions d'adulte auprès d'un tiers. Et de préférence quelqu'un qui a du recul sur ce qui vous arrive : un-e ami-e qui a de l'écoute ou un thérapeute (écoute et empathie garanties). Et de façon à ne pas trop envahir l'espace émotionnel de vos proches (ascendants, sœur, frère...). A ne pas s'appuyer uniquement sur eux pour vous aider à sortir de vos souffrances.
Pour ne pas enfermer l'enfant dans vos émotions
En effet, comment parler à son propre enfant alors qu'à l'intérieur, c'est la révolte ? Sans le blesser, sans l'enfermer dans notre propre colère, violence ou tristesse ? Comment créer un espace pour qu'il puisse dire lui aussi ce qu'il vit à sa façon à lui. Comment lui offrir un soutien en respectant sa propre écoute et vision de l'événement ? Mais aussi, ce qu'il pense de ce qu'il voit des réactions des adultes autour de lui ? Ce sont quelques questionnements destinés à tout adulte en relation avec des enfants, les siens ou ceux des autres.
Indicible
Ce sujet m'a été inspiré par le vécu d'une amie. Elle est grand-mère d'un petit garçon qui a perdu son père dans un accident de voiture. Guidée par ma sensibilité à cette situation, ces quelques mots sont juste un partage. Je n'ai pas de réponse toute faite. Ce ne sont que quelques pistes d'écoute et de reformulation pour tenter de mettre des mots sur un indicible.
Partage
A partir de la position qui est la mienne, j'ai écrit cette lettre. Peut être ces quelques communications pourront vous inspirer sur votre propre chemin.
Bonjour M... et bonjour H...,
C’est Odile, une amie de M... ta grand-mère. Elle m’a dit qu’elle avait une très grande tristesse de ce qui est arrivé à U..., son gendre à elle et ton papa à toi.
Alors je voulais dire à toi et à M... ce que j’ai appris sur les accidents qui causent la perte d’un papa et d’un gendre.
Tout d’abord que cet accident est arrivé tout d’un coup à U... ton papa, sans qu’il l’est décidé. Il ne voulait pas que ça arrive. Il ne voulait pas avoir un accident. Et en plus, personne, ni ton papa, ni M..., ni ta maman, personne ne croyait que ça pouvait arriver.
Alors, c’est pour ça qu’il est possible de ressentir une très grande colère. Et aussi de pleurer beaucoup quand on le sent. Ce que j’ai appris d’autre, c’est que même s’il a disparu, que plus personne ne peut voir U..., il est quand même possible de le garder vivant pour soi.
Par exemple, pour toi, ce serait de lui faire des dessins et d’écrire quelque chose dessus. Ou bien de planter un petit arbre et de t’en occuper pour le faire grandir.
Pour M..., ce serait par exemple de poser une photo de lui dans le salon, quelquefois cueillir une fleur et la poser devant la photo. Pour les amis de ton papa, ce serait par exemple de parler encore des bons moments passés ensemble et d’en rire encore.
Enfin, c’est à chacun de voir qu’est-ce qui est possible pour lui, pour faire quelque chose pour sa grande peine.
De mon côté, si je vous écris à M... et toi, même si je ne te connais pas vraiment H..., c’est que si je suis touchée par ce qui se passe pour toi, c’est que dans ma famille aussi il est arrivé qu’un enfant perde son parent. Car cela arrive dans toutes les familles, même si peu de personne en parle. Alors, il y a besoin de beaucoup de courage et d’amour et de parler et de pleurer dans les bras les uns des autres quand cela arrive.
Je suis contente que tu aies les bras de ta grand-mère et tous les bras de ta famille et des amis de ton papa. Voilà, je ne sais pas si ce que j’ai appris vous servira à vous deux. Moi ça m'a aidé et ça m’aide encore à mieux entendre comment je peux faire avec ces injustices, les accidents et les pertes.